Quand vous ne vous en sortez plus du cercle vicieux : éruption cutanée, stress, flambée inflammatoire, anxiété, eczéma, angoisse, démangeaisons… Cet article est pour vous! Mieux comprendre pour mieux gérer… et mieux vivre avec une maladie inflammatoire cutanée. Avec cet article, je termine ma série sur les liens entre stress et eczéma atopique.
Il vous démontre en 3 points pourquoi, physiologiquement, la peau est un véritable deuxième cerveau quand on parle de stress! Et ce que ça implique dans la prise en charge des pathologies inflammatoires de la peau, qui sont des « maladies du siècle »…
Le but de cet article est de poursuivre ma démonstration qu’on NE PEUT PAS SOIGNER un eczéma atopique chronique sans travailler sur la partie émotionnelle liée au stress.
Eruptions cutanées et stress : un cercle vicieux à bien comprendre, et traiter de façon holistique
Une pathologie dont les symptômes fonctionnent selon le dilemme de la poule et de l’oeuf ne se solutionne que de façon globale
Je parle beaucoup de dermatite atopique car je revendique ma posture de patiente-experte en la matière, mais sachez que mon propos est aussi valable pour les problèmes d’acné inflammatoire, de psoriasis, de lupus… tous les problèmes cutanés qui « fleurissent » sur un terrain inflammatoire.
En bref, ces pathologies sont à la fois sources intrinsèques de stress, et conséquences d’un stress chronique. Cause, conséquence, corrélation… Il s’agit en fait surtout de retenir :
- qu’on ne peut pas traiter le problème topique de façon isolée, externe, superficielle
- mais qu’il faut au contraire travailler le symptôme et le terrain [stress, anxiété] avec tout autant, sinon plus de vigueur…
…pour enfin rompre ce cercle vicieux et entamer un chemin de guérison profonde.
Je voux explique les liens physiologiques entre anxiété et éruptions cutanées inflammatoires en vidéo
Pour accompagner cet article et le raccourcir (!) j’ai réalisé une vidéo. Je vous propose de la visionner, pour comprendre dans le détail le lien étroit entre stress et éruptions cutanées… et voir ma cabine bien sûr! 😉
Bon visionnage!
Pourquoi la peau est votre deuxième cerveau, quand il s’agit de stress? 3 points pour tout comprendre
1/ Le système nerveux et la peau sont de même nature, à l’origine
Lorsqu’un embryon se développe, ses cellules s’organisent en plusieurs feuillets. 3 à 4 selon les approches et définitions des scientifiques.
Le feuillet qui va nous intéresser est le 3e feuillet, qu’on appelle l’ectoderme. A ne pas confondre avec les pachydermes, bien qu’à ce stade l’embryon n’ai en effet pas encore vraiment pris forme humaine 😉
Feuillet externe de l’embryon dont dérivent l’épiderme et le système nerveux chez les animaux (à l’exception des protozoaires et des éponges).
Le (gros) Robert 😉
Des médecins pionniers comme Pommey-Rey, d’abord dermatologue puis psychiatre-psychanalyste, ont tracé un sillon salutaire en dermatologie… Bien que ce sillon ne se soit pas franchement ouvert à la pratique de la dermato plus classique. La citation éloquente ci-après date déjà de plus de 20 ans… je n’invente pas la poudre, et pourtant, en matière d’éducation thérapeutique, on est loin du compte sur ce sujet me semble-t-il!
Et la source de la réflexion de ce médecin, est la suivante :
La peau et le système nerveux proviennent du même tissu embryonnaire, l’ectoderme. Plus tard, ces deux systèmes seront nettement différenciés, mais ils conservent des liens étroits. Une vingtaine de neuromédiateurs communs à la peau et au cerveau ont été décrits, et les recherches ont montré que non seulement les cellules cutanées ont des récepteurs pour les neuromédiateurs provenant du système nerveux, mais qu’elles peuvent elles-mêmes produire des neuromédiateurs et agir sur les cellules nerveuses. La sérotonine est l’un de ces neuromédiateurs communs. Les systèmes immunitaire et endocrinien sont aussi impliqués, et l’on parle du système neuro-endocrino-immuno-cutané. Le rôle du stress, des troubles du sommeil ou de la dépression sur la peau s’explique par la sécrétion perturbée des neuromédiateurs communs, amenant aux processus de vasodilatation, d’inflammation, d’hyperséborrhée ou de troubles de la pigmentation
Pomey-Rey, 1999, cité par Delphine Vust dans l’article « Psychodermatologie et Moi-Peau » de la Revue Psychothérapie, 2010
Or, la peau atopique est structurellement poreuse, et ainsi typiquement inflammatoire.
Du coup, cette inflammation va toucher un tissu truffé de neuromédiateurs, la peau. On va donc avoir des messages d’alerte permanents, au niveau cutané comme au niveau du système nerveux central (traité au niveau du cerveau). Ces « voyants au rouge » vont générer une réponse de stress généralisée au niveau du cerveau mais aussi de la peau elle-même. C’est le cercle vicieux « inflammation – stress-inflammation ».
2/ Eruptions cutanées et stress : parlons de la douleur!
Vous vous reconnaissez dans une des affirmations suivantes…
- « je suis à fleur de peau »
- « je suis sur les nerfs »
- « j’ai les nerfs à vif »
- « je suis hypersensible »
- « j’ai des réactions, comme ça, épidermiques »
… si vous souffrez d’une pathologie inflammatoire cutanée chronique, rassurez-vous, vous n’êtes pas seul.e! et c’est à cause de votre peau!
Comment ça fonctionne?
Une hormone a conditionné notre survie, en permettant la vitalité de notre système nerveux sympathique. Vous savez, celui qui active notre métabolisme et le conditionne pour permettre une réponse « fight or flight » en cas de peur ou de danger?
Le « facteur de croissance nerveux » ou Nerve Growth Factor (NGF) est indispensable au développement et à la maintenance des cellules du système nerveux dit sympathique recourant aux médiateurs dopaminergiques. Aussi bien dans l’organisme qu’en laboratoire, ce facteur s’est révélé vital pour la survie de ces neurones.
Les Archives du Monde, sur le Prix Nobel de médecine de l’année 1986, je suis vintage aujourd’hui 😉
Sauf que, il y a un MAIS. Vous vous en doutez.
Ces facteurs de croissance sont aussi bien produits au niveau du système nerveux central qu’au niveau épidermique, du fait, on l’a vu, de l’origine de l’ectoderme dans le développement embryonnaire des êtres humains.
Or, que se passe-t-il en cas de stress chronique? Et bien la concentration de ce fameux facteur de croissance nerveuse va augmenter au sein du réseau de fibres sensitives qui maille notre peau, et activer la production d’une certaine « substance P ».
Donc, le stress chronique et le stress atopique renforcent la production d’un neuromédiateur de la douleur au niveau cutané.
C’est ce mécanisme qui explique que des plaques d’eczéma, que d’aucun considéreraient comme bégnines, peuvent en fait causer une douleur très importante.
Cette douleur est aussi, à mon sens, trop peu évoquée lorsqu’on parle d’eczéma. Les personnes qui n’en souffrent pas (y compris de nombreux médecins), évoquent volontiers une « gêne esthétique », « à cause du prurit » (démangeaisons).
C’est vrai, mais ça oblitère complètement un sujet tout aussi… douloureux, qu’on retrouve avec l’eczéma, mais aussi le psoriasis, l’acné, le lupus, bref, toutes les inflammations cutanées. Sur fond de stress, ces inflammations, un peu douloureuses comme toute inflammation, le deviennent carrément. Et cette douleur bien réelle, et plus intense que ce que les lésions pourraient laisser à croire, n’est à peu près… jamais prise en compte?
3/ Eruption cutanées : quand les cellules de la peau produisent des hormones de stress
Enfin, et c’est notre dernier point, les cellules de la peau fabriquent, on l’a vu, des neuromédiateurs. Et en particulier, de la corticotrophine, ou ACTH.
Or, cette corticotrophine va avoir pour effet d’augmenter la production de cortisol, au niveau central mais aussi local, au niveau des kératinocytes (cellules qui composent les couches superficielles de l’épiderme) et des follicules pilo-sébacés.
Donc, la peau est en elle-même une usine de production de l’hormone de stress.
En cas d’inflammation chronique, la peau s’auto-inonde, en quelque sorte, d’hormone de stress… au cas où la production de cortisol aurait été insuffisante au niveau central…
Conclusion
Il est urgent de considérer et prendre en charge les pathologies inflammatoires cutanées dans leur globalité.
Passer à côté de la dimension émotionnelle, et en particulier l’anxiété, c’est passer à côté du chemin de rémission des crises, et de la dynamique de guérison.
Communiquons sur le stress atopique, et prenons enfin en charge la santé mentale des personnes atteintes de dermatite atopique et autres inflammations cutanées chroniques!
Comprendre que nous n’avons pas qu’un « seul cerveau » me semble tellement important… Que ce soit le ventre, la peau ou bien d’autres organes nous nous devons de prêter attention à tous les signes que nous envoie notre corps. 100% d’accord avec votre article très bien sourcé d’ailleurs. Bravo à vous.
Extrêmement intéressant de rappeler l’origine ectodermique identique de la peau et du système nerveux et ainsi toutes les hormones et neuro-hormones qui interviennent dans leur fonctionnement.
Ensuite, je nuancerai le fait que « le stress est surtout une conséquence de l’eczéma » et la question de l’existence ou pas de l’eczéma nerveux.
En tant que docteur vétérinaire, les manifestions prurigineuses et eczématiformes des animaux peuvent tout à fait être consécutifs à une source de stress intense (cela est même assez fréquent chez le chat). Le stress est initial et les problèmes cutanés surviennent en conséquence. Ensuite c’est en effet un cercle vicieux, plus l’animal se gratte, plus il a mal (lésions douloureuses), plus le stress s’accroit.
Voilà pour l’apport de la pathologie comparée qui est toujours très riche d’enseignement quant à la compréhension des mécanismes physiopathologiques 😊
Quel travail de recherche et d’observations. Sincèrement je suis bluffée. Bravo jolie wHoUman et merci. Curieuse de la suite de cette saga 👍👍👍
Merci ma chère Marie pour ta lecture assidue, j’essaie vraiment de contribuer à une forme d’éducation thérapeutique sur le sujet de la peau… et surtout j’essaie de trouver un équilibre entre apports scientifiques pour les esprts les plus rationnels qui ont besoin de preuves pour croire (je comprends), et observations instinctives (pour celleux qui ont déjà des bases, et dont l’enjeu est avant tout d’apprendre à retrouver l’instinct de santé)… tu l’as bien relevé, merci 🙂 A très vite!